Éducation nationale : la nouvelle « grande muette » ?
Le syndicat Action & Démocratie CFE-CGC prend connaissance de la sanction qui frappe l’un des siens, René CHICHE, professeur agrégé de philosophie, vice-président et porte-parole de notre organisation, membre titulaire du conseil supérieur de l’éducation où il siège en tant que représentant de notre confédération CFE-CGC. Sans que ne lui soit reprochée la moindre faute dans l’exercice de ses fonctions ou à l’occasion de celles-ci, le ministère de l’éducation nationale décide de l’en exclure pour une durée de trois mois, sanction très lourde qui est non seulement privative des droits à rémunération mais également des droits à avancement et retraite ; sanction absurde qui prive des élèves de leur professeur à quelques semaines de l’épreuve de philosophie du baccalauréat à laquelle il les prépare ; sanction inique qui fait suite à une procédure disciplinaire déclenchée dans des conditions obscures sur lesquelles il reste à faire toute la lumière.
Le syndicat Action & Démocratie CFE-CGC se déclare unanimement solidaire avec René CHICHE : en l’attaquant pour des interventions sur les réseaux sociaux, les radios et les télévisions où il s’exprime pourtant en qualité de responsable syndical, c’est au syndicat Action & Démocratie CFE-CGC lui-même que s’en prend le ministre, et ce sont tous les personnels de l’éducation nationale que l’on cherche à intimider à travers lui. Combien d’entre eux en effet n’osent déjà même plus parler et se réfugient dans l’anonymat des réseaux sociaux qui leur semble être la seule façon de pouvoir exprimer ce qu’ils ont à dire sans être inquiétés ? L’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme énonce pourtant clairement que « tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. » Nous ne laisserons pas une administration en perte de repères désigner des « boucs émissaires » ici et là pour mettre le corps enseignant tout entier sous tutelle. Nous ne laisserons pas le ministère intimider les personnels de l’éducation pour les priver de leur droit d’exprimer leurs opinions ou les dissuader d’en faire usage.
Le syndicat Action & Démocratie CFE-CGC est déterminé donner à cette affaire toutes les suites qu’elle mérite, au plan juridique aussi bien que médiatique et administratif, afin de défendre la liberté d’expression pour tous et l’exercice du droit syndical qui sont menacés non seulement dans le champ de l’éducation nationale mais également au sein de notre société. Cela doit devenir une cause nationale.
Supprimer des heures de cours pour élever le niveau :
la “transformation du collège”, ça commence mal !
Le 21 janvier dernier, le Directeur général de l’enseignement scolaire a demandé aux recteurs et directeurs académiques des services de l’éducation nationale de mettre en œuvre des mesures nouvelles pour la classe de 6ème dès la rentrée 2023 « dans le cadre de la transformation du collège ».
Cette transformation du collège a-t-elle fait l’objet d’une présentation et d’une explication détaillées ? La réponse est non. Y a-t-il eu un débat avec les parties concernées ? La réponse est encore non. Y a-t-il à ce jour un consensus sur les difficultés à résoudre et les mesures proposées par le ministre ? Pas davantage. Cette « transformation » du collège a donc été décidée de manière unilatérale et se met en place en catimini, par petites touches, mais toujours avec brutalité.
Action & Démocratie/CFE-CGC dénonce avec constance un tel mode d’administration de l’éducation nationale. Année après année, on maintient le système éducatif sous tension par des transformations mal inspirées décidées sur un coin de table et on impose aux personnels des mesures qui, dans les faits, ne produisent aucun des effets escomptés et aggravent souvent les maux auxquels on prétendait remédier. Au Conseil supérieur de l’éducation et par un courrier officiel dont nous publierons la réponse, nous interpellons le ministre sur ce procédé inacceptable mais aussi sur les conséquences très graves de ses décisions précipitées (voir ci-dessous).
Tout d’abord s’agissant du procédé lui-même consistant à faire appliquer des textes qui n’existent pas encore, ce qui est stupéfiant dans un État de droit ! En effet, les mesures en question (mise en place d’une heure hebdomadaire de « consolidation ou d’approfondissement » en classe de 6ème en retirant aux élèves une heure de technologie ainsi que généralisation du dispositif « Devoirs faits ») n’avaient aucun fondement réglementaire au moment même où, le 21 janvier 2023, le ministère demandait à l’encadrement que ces « évolutions » soient mises en œuvre dans le cadre des travaux préparatoires à la rentrée 2023 ! Certes, les « travaux réglementaires » ont suivi et les textes ont finalement été présentés au Conseil supérieur de l’éducation le 24 avril où, une fois encore, ils ont reçu un avis défavorable dont le ministère avait d’une certaine façon annoncé à l’avance qu’il ne tiendrait aucun compte (voir notre déclaration et le compte rendu ci-après) !
Quant aux effets de ces mesures sur les services des professeurs de technologie, le ministère n’en a cure. Or il n’est pas permis de faire subir une telle insécurité juridique aux personnels en leur annonçant que leur spécialité sera renforcée (c’est-à-dire ne sera pas davantage massacrée) à partir de la rentrée 2024 au cycle 4 après les avoir mis en janvier face à des perspectives de complément de service, de remplacements, de régime sec en matière d’heures supplémentaires quand ce n’est pas de simple suppression d’emploi pour les contractuels. C’est pourquoi Action & Démocratie prendra une fois de plus ses responsabilités en saisissant le Conseil d’État pour faire suspendre l’arrêté qui supprime une heure de technologie en 6ème, et nous invitons naturellement tous ceux qui veulent s’y joindre à le faire avec nous.
Quant à l’intervention des professeurs des écoles au collège, étant donné qu’elle ne repose sur aucune base réglementaire comme nous l’avons écrit au ministre, nous incitons les intéressés à se montrer prudents, pour ne pas dire méfiants, vis-à-vis des sollicitations des IEN et nous étudions également en l’espèce les possibilités d’action juridique contre une mesure dépourvue de bon sens autant que de fondement réglementaire.
Sur le fond, une énième transformation du collège se met en œuvre, par étape et à bas bruit, sans doute pour éviter les débats et polémiques qui ont accompagné la précédente ou le saccage du lycée. Mais là où il n’y a pas de débat, il n’y a pas de démocratie. Action & Démocratie réclame un débat sérieux sur tous les sujets, le collège y compris. La « primarisation » de la sixième n’est pas du tout une solution aux difficultés rencontrées au collège, lesquelles sont avant tout le résultat de politiques éducatives insensées et démagogiques qui détériorent les conditions de l’enseignement partout, et ce dès l’école primaire et maternelle. Aucun dispositif de « remédiation » ne peut remplacer les heures de cours supprimées ni ne peut compenser les difficultés de plus en plus lourdes liées à des classes surchargées, une politique d’inclusion qui fait fi de la réalité et cause des préjudices à tous, des programmes vidés de toute consistance, une perte de sens dans l’exercice du métier ressentie par tous les personnels à tous les niveaux qui s’ajoute à la dévalorisation matérielle et symbolique de leur métier. Pour Action & Démocratie, l’urgence est bien de reconstruire l’école en préservant d’abord et renforçant ce qui tient encore debout au lieu de s’employer avec rage ou ruse à l’abattre comme on le fait encore. Les ministres passent, les manières changent, mais l’orientation générale demeure et l’éducation n’est plus une priorité car non, décidément, on ne nous fera pas croire qu’on veut élever le niveau d’instruction en supprimant encore des heures de cours au profit d’heures de rien !
Nos interventions
Conseil supérieur de l’éducation – 24 mars 2023
Dans sa déclaration préalable, A&D dénonce l’application de mesures non publiées et renouvelle l’exigence de bon sens que soit inscrite dans le code de l’éducation la règle d’un délai de deux ans entre la publication et la mise en œuvre de tout texte portant modification de l’organisation et du contenu des enseignements.
Maintenir un enseignement de technologie en sixième
Position d’A&D, dossier documentaire, lettre au ministre. Non seulement il est insensé de supprimer des heures de cours en affirmant vouloir relever le niveau mais il est inepte d’affaiblir à notre époque un enseignement aussi indispensable que celui de technologie.
Professeur des écoles au collège ! Mais de qui se moque-t-on ?
Alors que nous sommes déjà surchargés et sous-payés, notre ministre ne trouve rien de mieux à faire pour améliorer notre condition que de nous pousser à intervenir, nous professeurs des écoles, dans les collèges ! Pour ce faire, il n’hésite pas à supprimer une heure d’enseignement de technologie en 6ème, contraindre nos collègues enseignants de technologie à aller compléter leur service ailleurs, chambouler aussi les programmes de cette matière ! Non seulement on ne répond pas à nos demandes, mais on se sert de nous pour détériorer les conditions de travail d’autres enseignants !
Nous ne pouvons qu’exprimer notre indignation face à de telles mesures qui portent atteinte à l’intérêt de nos élèves de multiples façons. Pourquoi envisager de nous faire intervenir dans les collèges, sous prétexte de consolider ce qui n’a pas été bien acquis par certains élèves, au lieu de nous donner les moyens d’exercer correctement nos missions et de nous occuper de tous nos élèves en diminuant la taille des classes ? Nous savons tous que, sous un vernis progressiste et bienveillant, cette heure hebdomadaire de consolidation ne sert qu’à masquer l’absence de moyens et d’ambition pour l’éducation. Cette proposition est d’abord une insulte à notre intelligence et notre professionnalisme !
Et que dire des échanges de services entre enseignants du premier et du second degré ? On voit bien que, pour le ministère, c’est une solution magique et peu onéreuse pour pallier les carences du système éducatif et les effets sur le recrutement d’un métier dévalorisé. Cependant, les enseignants ont des statuts et des obligations de service bien définies. Ne pas les respecter et leur imposer une surcharge de travail pourrait avoir des conséquences graves sur leur santé physique et mentale. Comment garantir la qualité de l’enseignement dans ces conditions ? Où est la logique là-dedans ? C’est du grand n’importe quoi ! Il est intolérable de faire reposer une fois encore sur les épaules des enseignants la responsabilité de compenser le manque de ressources et de moyens de l’État pour l’éducation. Nous, les enseignants, ne sommes pas des pions que l’on peut déplacer à loisir sur tel ou tel poste pour satisfaire les exigences d’austérité budgétaire.
Nous ne pouvons laisser cela ! Nous devons être unis dans le refus de ces mesures injustes et inadéquates. Il est temps de mettre fin à cette mascarade et de revenir à des mesures justes et équitables pour les enseignants et les élèves. Il est temps de prendre en compte les besoins réels de l’éducation et de cesser de chercher des économies au détriment de l’avenir de nos enfants. Honte à ceux qui ont proposé et soutiennent ces mesures indécentes ! Action & Démocratie s’empare du dossier et interpelle le ministre sur leur caractère injuste et de surcroît non réglementaire.
Pour aller plus loin
Intervention des professeurs des écoles au collège, c’est non ! Action & Démocratie écrit au ministre
Rentrée 2023 : nouvelle occasion manquée pour diminuer les effectifs à l’école primaire
Fin janvier, le ministre de l’EN annonçait son intention de mettre en place dès septembre 2023 une heure de « consolidation », autrement dit de soutien mathématiques/français, pour les élèves de 6e dans le cadre du « pacte enseignant » (augmentation de salaire contre heures supplémentaires). Dans une simple lettre adressée aux recteurs et directeurs académiques, Pap Ndiaye indiquait en outre que cette heure pourrait être assurée par des professeurs des écoles. Ah ? Vraiment ?
63 700 élèves en moins en 2023, après une baisse de 50 000 élèves en 2022, et le phénomène devrait encore s’accentuer dans les prochaines années. Une opportunité pour diminuer les effectifs en maintenant le nombre de postes. Eh bien non ! Le ministère en profite pour supprimer 1500 postes. A&D soutient toutes les actions menées sur le terrain par les parents, élus, citoyens et enseignants mobilisés afin de mettre la pression sur le ministère et obtenir la suspension de ces fermetures de classe indignes et inacceptables.
A&D écrit au ministre de la fonction publique et au ministre de l’éducation pour que l’usure professionnelle soit enfin prise en compte.
La CFE-CGC dont Action & Démocratie fait partie est signataire de l’appel intersyndical interprofessionnel à mettre la France à l’arrêt le mardi 7 mars. Nous appelons nos adhérents, nos sympathisants et tous les personnels de l’éducation à cesser le travail et manifester une fois de plus notre refus de cette réforme des retraites.
Le report à 64 ans de l’âge permettant de liquider la pension est une mesure inacceptable et, s’agissant des fonctionnaires que nous sommes, parfaitement inutile puisqu’il n’y a pas de déficit à résorber. Rappelons en effet tout d’abord que nos pensions sont inscrites au Grand Livre de la Dette publique (dont la création remonte à 1793) et qu’elles sont une charge de fonctionnement de l’État au même titre que nos traitements. Rappelons que les retenues pour pensions ne sont pas des cotisations et qu’elles n’alimentent pas une caisse de retraite mais directement le budget de l’État. Rappelons que, tandis que le point d’indice était gelé et que nos traitements continuaient à baisser comparativement au SMIC, le taux de retenue pour pension civile passait quant à lui de 7,85% à 10,55% en 2010 pour atteindre 11,10% en 2020. Rappelons enfin que c’est aussi en 2010 que l’on repoussa déjà l’âge légal à 62 anset l’âge d’annulation de la décote à 67 ans, entre autres mesures scélérates puisque l’on supprima en même temps la cessation progressive d’activité (CPA) dont nous bénéficiions encore, et ce comme s’il s’agissait d’un privilège. Trop, c’est trop ! Action & Démocratie ne peut tolérer qu’on continue d’appeler « réformes » de tels reculs en matière de droits sociaux.
Pour nous, personnels de l’éducation, cette mesure d’âge est d’autant plus inacceptable qu’elle s’ajoute à une gestion des ressources humaines par le ministère qui s’apparente déjà à de la maltraitance. Outre la paupérisation scandaleuse de tous les corps de l’éducation, notre ministère refuse obstinément de prendre en compte le fait que nous faisons partie des professions les plus exposées à la violence, phénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur, tout comme il refuse de prendre en compte l’usure professionnelle, qui lui est lié. Il est temps de réagir. Comme nous vous l’annoncions dans notre lettre d’information n°64 du 19 janvier 2023, Action & Démocratie saisit le ministre de l’éducation nationale ainsi que le ministre de la fonction publique pour avancer sur ce sujet. Nous sommes les seuls à faire des propositions concrètes, utiles et réalistes pour que l’usure professionnelle soit enfin reconnue et prise en compte, tant par le rétablissement dans une forme actualisée de la cessation progressive d’activité que par l’aménagement des fins de carrières sur lequel nous dévoilerons nos propositions dans notre prochaine lettre d’information.
Ne nous résignons pas ! Rejoignez un syndicat qui porte la voix de ceux qui font vivre l’école de la République ! Rejoignez un syndicat qui fait le pari de l’intelligence ! Ensemble, prenons notre avenir en main !
La cessation progressive d’activité, une brève histoire, et pour cause !
Quelles sont les perspectives des enseignants pour leur fin de carrière ? Voilà une question qui, du fait de l’allongement de la durée du travail et du vieillissement progressif du corps professoral, se pose avec une acuité toujours plus grande. Pour y répondre, regardons dans le rétroviseur : rappelons-nous les dispositifs mis en place et voyons ce qu’il en est advenu. Morosité garantie !
Enclenchons donc la machine à remonter le temps et revenons une petite quarantaine d’années en arrière. A l’époque, l’URSS – quoique congelée par la glaciation brejnévienne – était au sommet de sa puissance ; il était hors de question de dégrader, en France, les conditions de travail des salariés, y compris des fonctionnaires. Non pas pour leur bien-être, comme des esprits naïfs ont alors pu le croire, mais pour éviter qu’ils ne basculent vers le puissant parti communiste. L’heure était à la guerre des étoiles et le côté dit obscur ne devait pas triompher.
Les avancées sociales étaient donc de mise, y compris – ô, temps béni ! – pour les professeurs. C’est dans ce contexte que le 31 mars 1982 fut publiée l’ordonnance n° 82-297 modifiant le code des pensions civiles et militaires de retraite. Elle créait pour les fonctionnaires en général, et donc pour les enseignants, un dispositif inédit : la cessation progressive d’activité, plus connue sous l’acronyme CPA. Merveilleuse innovation qui permettait, à condition d’avoir 25 années de service public à son actif, de travailler à partir de 55 ans à mi-temps.
Avec, cerise sur le gâteau, une rémunération non pas de 50 % de son salaire normal … mais de 80 % ! Un mécanisme très généreux donc, qui permettait aux professeurs en fin de carrière, les plus susceptibles d’avoir des problèmes de santé ou tout simplement de motivation, une transition en douceur vers la retraite qu’ils devaient obligatoirement prendre à 60 ans. A condition de remplir à cet âge toutes les conditions nécessaires, notamment avoir cotisé 37,5 ans, ce qui ne posait pas de problème pour des personnes souvent recrutées à bac + 3
15 ans plus tard, un autre dispositif fut mis en place par la circulaire du 23 janvier 1997 : le congé de fin d’activité, qui offrait la possibilité, à partir de 58 ans, aux fonctionnaires ayant 37,5 ans de cotisation et 25 ans de service public, de cesser de travailler tout en touchant 75 % de leur traitement des 6 derniers mois. Un dispositif cumulable avec la CPA, qui permettait ainsi à ceux qui avait commencé à cotiser dans leur vingtième année de travailler à mi-temps de 55 à 58 ans puis d’opter pour le congé de fin d’activité.
Un cas de figure alors fréquent, puisque nombreux étaient les étudiants qui faisaient des petits boulots pendant les vacances. Nombreux aussi étaient ceux qui commençaient leur carrière dans l’Education nationale par les fonctions de MA (maitre auxiliaire) et de MI-SE (maitre d’internat – surveillant d’externat, plus connus sous le nom de pions). A tel point qu’en 2004 plus de 22 % des certifiés partant en retraite étaient en CPA et 21 % en congé de fin d’activité. Le besoin d’une fin de carrière aménagé était donc réel.
Mais ça, c’était avant ! Avant 2003, date à laquelle trois changements majeurs ont eu lieu. La réforme des retraites, bien sûr, qui a porté la durée de cotisation de 37,5 ans à 40 ans, ce qui rendait impossible, pour un enseignant recruté à bac + 3 et une année de préparation du concours, un départ avec une retraite à taux plein avant l’âge de 62 ans. Mais aussi la modification de la CPA qui n’était désormais accessible qu’à partir de 57 ans aux agents ayant 33 ans de service public pour une rémunération ramenée à 60% du salaire normal.
Sans compter la mise en extinction du congé de fin d’activité qui, sans être supprimé, n’était plus ouvert qu’aux génération 1943 et 1944 avec 37,5 ans de cotisation. Toutes les suivantes devaient avoir cotisé 40 ans à l’âge de 58 ans, c’est-à-dire avoir commencé à travailler à 18 ans. Impossible, bien évidemment, pour les professeurs dont la fin de carrière commençait à se durcir.
C’en était donc bel et bien fini des aménagements de fin de carrière pour les enseignants. Une triste réalité qui a été actée par la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 dont l’article 54 a purement et simplement supprimé la CPA.
Pire, la durée de cotisation pour avoir droit à une retraite à taux plein est depuis passée par paliers successifs à 42 ans. Avec le décalage récent du concours à la fin de la 2ème année de master, cela rend aujourd’hui impossible de fait un départ en retraite avec une pension à taux plein avant l’âge de 65 ans, même si l’âge légal de départ possible est resté fixé à 62 ans. Sauf à accepter de partir avec une décote, et donc avec une pension sensiblement minorée.
Les conditions de travail des professeurs – affectées par une numérisation croissante, les faisant crouler sous un nombre toujours plus élevé de mails présentés comme plus importants les uns que les autres, et par des rapports de plus en plus conflictuels avec leur administration et avec les familles des élèves – s’étant progressivement dégradées au fil des ans, 33% des enseignants du 1er degré et 23% de ceux du 2nd degré s’étaient pourtant résolus à cette décote en 2020.
Et maintenant, que propose le gouvernement ? Un report de l’âge légal de départ possible en retraite à 64 ans avec une hausse de la durée de cotisation à 43 ans pour pouvoir bénéficier d’une pension à taux plein ! Concrètement, cela signifie qu’un professeur étant entré dans le métier à 23 ans, c’est-à-dire en ayant obtenu le concours dès la 1ère tentative après avoir réalisé un cursus universitaire sans faute, devra attendre 66 ans pour bénéficier pleinement de sa retraite.
Une perspective difficilement supportable pour la très grande majorité des professeurs, ce qui a amené le gouvernement à l’adoucir en annonçant l’extension à la fonction publique du dispositif de retraite progressive. Ainsi pourraient désormais partir en retraite deux ans avant l’âge légal les fonctionnaires justifiant d’un nombre de trimestres cotisés qui n’est pas encore précisé, mais qui devrait se situer aux alentours de 160 … soit 40 ans !
Ce dispositif serait financé pour la quotité travaillée par le Ministère et pour la quotité non travaillée par un tirage sur les droits à retraite acquis au moment de l’activation de la retraite progressive. Certains affirment qu’il s’agit d’un retour à la CPA, mais sa durée et son financement qui ne coûtera rien au Ministère montrent qu’il n’en est rien. D’autant qu’il ne s’agira pas d’un droit, mais d’une possibilité soumise à l’autorisation de l’employeur.
Face à cette situation, Action & Démocratie demande au gouvernement de prendre conscience du durcissement qu’a connu la fin de carrière des enseignants depuis une vingtaine d’années et de prendre des mesures fortes pour la rendre plus supportable. Elles ne manquent pas : de la remise en place de la version initiale de la CPA, avec un âge fixé à 57 ans, à l’utilisation de l’expérience acquise par les professeurs chevronnés au profit des entrants dans le métier, Action & Démocratie fait des propositions concrètes, utiles et réalistes.
Là où il y a une volonté, il y a un chemin. Au gouvernement de montrer qu’il a cette volonté et nous ferons alors tout pour l’accompagner au mieux…